Prenez un fauteuil, un coussin, une tasse de thé : Neph s'occupe du reste et vous parle sur son blog de livres et de films, au gré de ses découvertes...
Voici un livre dont la lecture se sera fait attendre...
Sur un forum que certaines d'entre vous connaissent et que je fréquente assidûment, quelqu'un a évoqué un jour ce roman, en précisant juste qu'il était en train de le lire. En voyant ce titre, j'ai eu la réaction suivante "rhooo-intéressant-ce-titre-ça-m'intrigue-lé-où-mon-ptit-carnet-que-je-le-marque-sur-ma-LAL-rhaaa-mais-iléoùscarnééé..." Je m'arrête là :) Arrive le jour bienheureux où je vais faire un tour en librairie AVEC ce fameux carnet, que j'oublie d'habitude, ce qui fait que ma LAL n'a aucune chance de diminuer. Bref. Je cherche les titres un par un pour savoir sur lequel d'entre eux me porterait mon coix immédiat, et voici la couverture que j'ai trouvée pour ce roman...
Et là ma réaction à l'instant T : "rhaaa-bouh-non-pas-un-livre-avec-des-nazis-et-la-guerre-toussa-spas-gai-chu-pas-dans-l'ambiance". J'avoue, je n'ai pas toujours des réactions très évoluées. Pour l'anecdote, ce jour-là, mon choix s'est porté sur Le Pendule de Foucault, d'Umberto Eco, qui moisit toujours dans ma PAL (le livre, pas Umberto).
Avant les vacances, je l'ai pourtant emprunté au CDI de mon établissement, et j'ai repoussé la lecture jusqu'à la fin de la première semaine : aucune envie de le lire pendant mon séjour malouin. Et puis finalement, je l'ai ouvert quand même sur le chemin du retour, puisque nous avions quelques heures de train devant nous. Et monsieur lisait du Chattam, il n'avait donc aucune envie de me faire la causette plus que de raison :)
J'ai été hapée par ce roman. Je l'ai lu d'une traite en 5h, sans pouvoir lever les yeux du livre... (Eh beeeeen, ma présentation a été longue...)
"Bon, vas-y, dis-nous plutôt de quoi ça parle !" : ATTENTION, JE RACONTE LE LIVRE EN TOTALITE.
Rudolf Hang a une dizaine d'années quand commence ce roman dont il est le narrateur. Son père, extrêmement croyant, mène la famille d'une main de fer. Tous les matins, il oblige Rudolf à l'accompagner à la messe avant d'aller à l'école. A la maison, les enfants ont l'interdiction de regarder dans la rue et doivent demander la permission de parler. Le seul moment de détente de Rudolf, c'est quand il est seul dans sa chambre et qu'il cire ses chaussures pendant de longues minutes. Il explique d'ailleurs que la routine et les contraintes le détendent, le soulagent : il sait où il va ainsi.
Après un incident avec un camarade de classe, Rudolf va se confesser en demandant au prêtre de ne rien répéter à son père. Toutefois, celui-ci va être mis au courant, et Rudolf, pensant logiquement que le prêtre est en faute, perd la foi. Cela va être un tournant dans sa petite vie : il décide de s'engager dans l'armée et y parvient, alors que son père le destinait à une carrière religieuse.
Très discipliné et rigoureusement obéissant, quitte à causer la mort de ses frères d'arme, Rudolf trouve dans la condition de soldat un milieu qui lui convient. Malgré son jeune âge (environ 16 ans), il est repéré par sa hiérarchie et commence à gravir les échelons parmi les Corps Francs de l'armée allemande.
Une fois les combats terminés, Rudolf s'engage dans le parti national-socialiste. Après quelques temps en usine, il est engagé par un ancien militaire qui lui propose de retaper une ferme et de s'y installer. Rudolf accepte, et il accepte même d'épouser la femme qu'on lui propose... En effet, en bon Allemand, Rudolf a pour ambition de fonder une famille respecteuse des valeurs de sa patrie, tout comme lui, et de redonner la valeur qu'elle mérite à l'Allemagne humiliée par les termes du traité de Versailles signé à l'issue de la Première Guerre mondiale (merci le Malet-Isaac, pour ceux qui suivent !).
Les efforts déployés par Rudolf le font repérer, et il est désigné par Himmler lui-même pour créer une milice destinée à intégrer les forces armées hitlériennes. Ayant mené sa mission à bien, Rudolf est chargé de devenir l'administrateur d'un futur camp de concentration à Auschwitz. Rudolf en supervise la construction et, sur les ordres de sa hiérarchie, le transforme ensuite en camp d'extermination. Et puisqu'il réussit si bien, Rudolf est poussé à faire du "rendement" : il faut tuer toujours et toujours plus. Il met en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour faire toujours mieux, selon les critères...
Mais la victoire alliée inattendue surprend, et après quelques mois de cache-cache, Rudolf est arrêté, et condamné à mort.
J'EN AI FINI AVEC LES SPOILERS, VOUS POUVEZ REPRENDRE VOTRE LECTURE (C'est vous qui voyez !)
Comme je l'ai dit plus haut, j'ai été happée par ma lecture. Difficile de dire qu'elle m'a plu, disons que le regard sur la Guerre et l'idéologie nazie vu du côté nazi et non pas victime (juif, puisque je n'ai pas encore lu de récit de victimes autres que juives) est forcément différent et perturbant.
La période de l'enfance est romancée par l'auteur, comme il l'annonce dans la préface. L'état d'esprit du jeune Rudolf est compréhensible : c'est un garçon qui vit dans la crainte permanente d'un père verbalement violent, qui se pose en martyr pour sa famille. Tous ses actes sont scrupuleusement réglés sur les volontés du père. Pourtant, si cela permet de mieux comprendre l'enfant et son malaise, cela n'excuse en aucune matière les actes de l'adulte, et l'auteur ne l'a pas écrit dans ce sens. Ce qui m'a le plus dérangée, au point d'éprouver un malaise certain pendant ma lecture, c'est de m'apercevoir la minutie apportée par Rudolf Lang dans la façon d'organiser la mise au point de la Solution Finale à Auschwitz. Il songe à tout, tous les petits détails qui pourraient permettre de gazer plus de monde à la façon, et à la manière d'optimiser les infrastructures. Impossible de penser qu'il n'ait pas à un moment ou à un autre ressenti de compassion, d'empathie au moins, pour les milliers et les millions d'êtres humains qu'il a vu passer devant ses yeux. Pourtant, tout cela se comprend mieux à la fin du livre, où, une fois arrêté, Lang confie au procès de Nuremberg qu'il n'a jamais envisagé ces gens comme des êtres, mais comme des unités à supprimer. Cela fait froid dans le dos. Là où l'horreur devient presque palpable, c'est lorsque Rudolf confie qu'il se considère non pas comme responsable, mais comme exécuteur. Il ne faisait qu'obéir aux ordres. D'ailleurs, il comprend qu'il risque gros en apprenant le suicide d'Himmler, qui lui a donné ces ordres : pour lui, Himmler a choisi une solution de facilité et l'a abandonné.
Robert Merle prévient dans sa préface que Rudolf Lang a existé : il s'appelait en réalité Rudolf Hoess. S'il a romancé l'enfance de ce Rudolf, Merle a en revanche exécuté pour la deuxième partie de son oeuvre un véritable travail d'historien. Que dire de cette phrase, prononcée par Hoess au précès de Nuremberg : "Je n'ai tué personne, j'étais juste le directeur du programme d'extermination d'Auschwitz" ? La question de la responsabilité doit-elle être entravée par une obéissance aveugle aux ordres donnés, quelles que soient les conséquences de ceux-là ?
Cette lecture m'a fait froid dans le dos, et entraîne de nombreuses interrogations... Je ne sais pas s'il existe d'autres romans écrits sous le même point de vue, mais je reste songeuse. Pour moi, cette lecture restera fortement marquante, difficile, et suscite une réflexion sans fin.
Je suis en train de le lire actuellement, et je ne suis pas encore arrivée à la période de la Seconde Guerre, c'est pourquoi je n'ai pas lu tout le passage qui risquait de me spoiler.<br />
Je ne peux pas vraiment donner mon avis sur ce livre étant donné que je ne suis pas encore rendue à la moitié, mais, en tous cas, je dois dire que je m'ennuie un peu pour le moment.<br />
Peut-être que la suite me passionnera plus !
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J'ai bien aimé surtout la partie de la faim. Je dois reconnaître que je me suis assez ennuyé quand la jeunesse de Lang est évoquée. Seule la dernière partie m'a réellement convaincu.<br />
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Je ne crois pas qu'une partie m'ait moins plu qu'une autre, à bien y réfléchir ! J'ai été passionnée du début à la fin.<br />
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zarline
04/05/2009 11:26
Je n'ai pas lu ce livre mais il me fait beaucoup pensé aux Bienveillantes de Littel, un livre que j'ai lu il y a plusieurs mois. Je crois que je vais attendre encore un pu avant de me replonger dans une atmosphère glauque.
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Avec les vacances d'été, j'aurai plus de temps devant moi, et je prévois de le consacrer notamment aux Bienveillantes...<br />
Je suis d'accord avec toi, ce sont des lectures qui laissent des traces.<br />
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Craklou
29/04/2009 10:50
Amusant ces commentaires croisés :-)! <br />
J'ai dévoré Fortue de France, mais je connais pas les autres ouvrages de Merle. mais c'est amusant, justement pendant mes vacances de la semaine dernière j'ai une copine qui avait emporté celui-là, et je me disais que je ferai bien de le lire aussi. J'ai donc zappé ton résumé, pour me concentrer sur la critique, et tu m'as convaincue!
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Que de coïncidences :)<br />
Si j'ai pu te convaincre, tant mieux : je n'arrête pas de repenser à ce bouquin et je me retiens de le relire dans l'immédiat, ce que je ne ferai jamais avec un autre bouquin... Essaie de le<br />
piquer à la copine en question !<br />
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herisson08
28/04/2009 21:44
Brrr effectivement un gros doute... j'ai sauté tout de même la partie spoilers, au cas je tombe dessus un de ces jours...