Prenez un fauteuil, un coussin, une tasse de thé : Neph s'occupe du reste et vous parle sur son blog de livres et de films, au gré de ses découvertes...
Lorsque Lola Gallagher, détective new-yorkaise, est appelée pour une fusillade dans un parc, elle ne s'attend pas à ce que la victime... ne soit pas tout à fait morte. La jeune femme, pourtant touchée par balle, vit toujours ; malheureusement, le choc l'a rendu amnésique. En retraçant son parcours pour tenter de comprendre qui elle est et pourquoi on a pu attenter à sa vie, Lola se heurte donc à des difficultés multiples : comment aider la jeune femme et mettre la main sur ses agresseurs si celle-ci ne peut l'aider ? Lola décide alors de faire appel à Arthur Draken, un psychanalyste renommé aux méthodes controversées, pour faire émerger des souvenirs inconscients.
Me voilà très ennuyée pour parler de ce livre qui mêle allègrement très bonnes idées et méthodes originales avec des répliques et des personnages allant, selon moi, du détestable au ridicule.Je m'explique :
L'intrigue, dévoilée en quatrième de couverture, permet de retracer ce qui correspond probablement à l'ensemble des tomes à paraître dans la première saison de cette série. De la même manière que pour des séries télévisées, le concept est décliné en saisons et en épisodes : là, les auteurs ont su adopter un rythme convaincant qui conviendra au plus grand nombre ! D'autres codes dignes des séries policières américaines sont eux aussi employés : une équipe soudée autour d'une inspectrice de choc, un expert médical travaillant en lien avec l'inspectrice, un chef qui rouspète mais qui ne croit pas vraiment à sa propre autorité... On entre dans un domaine qui, s'il n'est pas inédit en télé, annonce un vrai changement dans les policiers publiés en feuilletons.
Là où je suis encore séduite, c'est dans les quelques révélations, attendues ou non, au fil des pages : par exemple, ce que l'on apprend au sujet des consultations médicales effectuées par Lola est tout bonnement malin ! Il ne s'agit pas d'un véritable coup de théâtre, mais bien d'une surprise complètement inattendue : d'ailleurs, on devrait apprendre d'autres choses encore par l'indiscrétion d'un collègue de Lola.
De la même manière, les quelques pages qui suivent la fin de ce volume présentent de manière très fine des éléments du deuxième épisode, à paraître le 25 avril : on nous en dit suffisamment peu pour ne rien dévoiler de crucial, mais juste assez pour susciter l'envie ! Il n'est pas question de donner les premières pages du tome 2, ni le premier chapitre, mais bien de courts extraits pris dans ce qui semble être au moins la première moitié de l'oeuvre ; là encore, on se croirait à la fin d'un épisode de série qui nous appâte avec quelques images de l'épisode à venir ! Voilà qui est particulièrement bien pensé.
En revanche, et c'est là que le bât blesse, il m'a semblé que les personnages peinaient à se défaire de clichés un peu tenaces : les coucheries évoquées entre Lola et l'un de ses collègues me semblaient déjà superflues, mais qu'ils y reviennent à coup d'allusions ni discrètes, ni très fines et ça devient lourd...
Dans leurs répliques "professionnelles", les policiers ne sont pas non plus très fins. Alors que Lola et son collègue Phillip décryptent une vidéo prise de la jeune femme juste avant le drame et qu'ils comprennent qu'elle révèle des indices, ils regrettent qu'elle ne résolve pas carrément l'enquête à leur place : "Peut-être disait-elle que l'enlèvement y aurait lieu...
- Ou qu'il y serait préparé, proposa Detroit.
- C'est dommage qu'elle ne nous donne pas la date de l'enlèvement, ni le nom de la victime potentielle...
- Et encore moins celui des gens qui la poursuivent !
- Oui. Ca laisse encore pas mal d'inconnues." (page 151)
Certes. Mais c'est votre boulot, les gars !
Je crois que le pire est incarné par Arthur Draken, le fameux psychiatre qui file un coup de main à Lola et qui nous est donné à voir lors d'une consultation avec une richissime cliente qui l'ennuie ferme. Il l'écoute, mais son esprit vagabonde et il imagine ce qu'il pourrait répondre à sa vieille cliente : "Après le décès de votre mari, vous n'avez jamais désiré un autre homme ?
- J'ai soixante-et-onze ans, docteur Draken !
- Vous en aviez soixante-trois quand il est mort... Et, de toute façon, une femme n'a-t-elle plus le droit d'éprouver du désir à soixante-et-onze ans ?
- Vous parlez de désir... charnel ?
Oui, bien sûr, je parie que la nuit tu rêves de te taper un gang de laveurs de carreaux, petite cochonne !" (page 103)
[...]
"A l'époque, les enfants n'avaient pas tous ces moyens de distraction qu'ils ont aujourd'hui, vous savez !
Ah bon ? Oh, la Seconde Guerre mondiale, c'était quand même super fun, non ?" (page 106).
L'ensemble se passe, à mon avis, de commentaire : ces remarques ont beau n'être pas formulées ou être pleines d'ironie, elles tombent à plat et n'ont même pas l'intérêt de faire un bon mot. On oublie. Et j'ai bien peur que ces répliques et les clichés qui entravent les personnages, s'ils ne m'ont pas empêchée d'apprécier le reste du tome 1, ne me rebutent suffisamment pour que je ne continue pas plus avant.
Je remercie pourtant bien sûr les éditions J'ai Lu !