Hylas et sa soeur Issi sont des Parias : abandonnés en forêt alors qu'ils étaient tout petits, ils ont été recueillis par des villageois qui, loin de les sauver, les ont exploités pour garder leurs troupeaux. Mais un jour, des guerriers tout de noir vêtus, les Corbeaux, les attaquent : Hylas est séparé d'Issi et n'a d'autre recours que de prendre la mer pour échapper à ses poursuivants. Même la protection de son ami Télamon, fils du gouverneur, ne parvient pas à lui garantir la sécurité. Mais l'embarcation de fortune d'Hylas dérive et le jeune garçon échoue sur l'île de la Déesse. Il y fait la rencontre de Pirra, qui se cache pour échapper au mariage forcé qu'a conclu pour elle sa mère, la Grande Prêtresse. Il leur faut quitter l'île, mais comment ?
Je me suis toujours montrée très sceptique envers la littérature de jeunesse prenant pour cadre l'Antiquité, redoutant plus que tout la caricature d'une époque trop souvent malmenée pour l'adapter aux desiderata des auteurs. Or, Michelle Paver nous offre avec Le Temps des héros un véritable travail de recherche et déploie sous nos yeux un paysage à la fois soigné et captivant, dans lequel les héros agissent avec une grande fluidité : les montagnes grecques, l'île de la Déesse et la Lykonia surgissent clairement devant nous. Pour le décor donc, la réussite est totale.
Le roman est loin de disposer de ce seul atout : les personnages principaux, trois jeunes adolescents, ont chacun un caractère bien affirmé, se démarquant ainsi de trop nombreux héros de littérature de jeunesse, souvent trop lisses. Ils n'agissent pas que selon leur bon sens, mais aussi en fonction de leurs sentiments, leurs colères, leurs réflexes, et se rendent ainsi très attachants. Seule la mise en route de l'intrigue m'a au départ moins convaincue : les premières attaques des Corbeaux m'ont paru trop peu claires, tout comme l'importance donnée au poignard d'Hylas, mais l'ensemble se lie bien vite et forme un roman construit et, il faut bien le dire, vraiment prenant.
Là où j'ai haussé un sourcil dubitatif, c'est lorsqu'Hylas, à la dérive, se lie avec le dauphin qu'il nomme Esprit. Je n'ai jamais été une grande fan de Flipper, voyez, ni n'ai jamais rêvé de nager avec un dauphin. J'ai donc senti se profiler, aussi clairement que l'aileron du dauphin, le côté cucul de la chose. Et pourtant ! Je reconnais avec honnêteté que j'ai aimé suivre ces passages, et ce même lorsque l'on a accès aux pensées d'Esprit. Dit comme ça, ça sonne un peu niais, mais je peux vous assurer que ce n'est justement pas le cas.
Pour une fois donc, voilà un roman jeunesse à l'inspiration mythologique que j'ai trouvé fort bon et qui, je l'espère, ravira bien d'autres lecteurs. D'autant que, mes chers amis, il s'agit d'un premier tome... La série s'annonce bonne !
Merci aux éditions Hachette !