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24 janvier 2014 5 24 /01 /janvier /2014 19:08

Un soir, alors qu'il est tranquillement installé devant un documentaire sur les gazelles, Lancelot est appelé par la police : sa femme vient de mourir en tombant dans sa voiture du pont d'Omoko. Passant par tous les stades possibles entre abattement, désespoir et résignation, Lancelot va découvrir au fil des jours qui suivent cette funeste nouvelle qu'Irina n'était pas celle qu'il croyait. Il va même jusqu'à trouver la recette du napalm au milieu des recettes de cuisine ! Savoir qui était vraiment sa compagne va mener Lancelot sur un chemin délicat et douloureux.

 

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J'ai eu la chance de rencontrer Véronique Ovaldé lors de sa séance de dédicaces à la librairie auxerroise Obliques. Venue présenter La Grâce des brigands, son dernier roman, l'auteur en avait profité pour revenir avec gaieté sur son oeuvre déjà conséquente et les thèmes récurrents qu'on pouvait y déceler.

 

C'est son écriture si foisonnante d'images que j'aime tant chez Véronique Ovaldé. Dans ce livre, les couleurs et les matières sont si palpables qu'elles rendent sensible les impressions de Lancelot, que l'on voit notamment méditer en observant le camphrier par la fenêtre de chez lui, ou marcher dans les fleurs de cerisier le jour où il rencontre la troublante Irina pour la première fois.

 

Une vraie sensualité se dégage de la relation des deux amants, amoureux et fusionnels jusqu'à la moelle. Pourtant, Lancelot se rend compte a posteriori que cette relation sans tache cachait sous la surface des zones d'ombre : le passage dans lequel il se rend compte qu'elle était très détachée de lui au moment même où ils consommaient pour la première fois leur mariage est particulièrement fort en émotions.

 

Toutefois, si la forme m'a séduite, seuls quelques passages comme celui que j'évoque à l'instant m'ont intéressée. La double vie d'Irina ne m'a guère passionnée ni convaincue, trop fantaisiste à mon goût : seul le doux et inoffensif Lancelot a suscité mon intérêt. Mais j'ai toutefois eu plaisir à retrouver la belle plume de Véronique Ovaldé, découverte grâce à Caroline !

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30 décembre 2013 1 30 /12 /décembre /2013 12:05

Parties de leur Japon natal pour trouver un mari aux Etats-Unis, ces femmes ne s'attendent pas à devoir y mener une vie plus éprouvante encore que ce que leur propre mère ont enduré au pays. Entre la misère, un labeur acharné et sans trève, et le manque de considération des Américains envers elles, ces femmes vivent et doivent "faire avec".


 

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Je ne pouvais pas ne pas parler sur ce blog de ce qui est très probablement ma plus belle lecture de l'année. Et pourtant, parce que la littérature asiatique, ou d'inspiration asiatique, ne me parle guère, j'aurais très bien pu ne jamais lire ce petit chef-d'oeuvre. C'est encore une fois grâce à ma libraire fétiche* que ce bijou est arrivé entre mes mains : étant d'humeur à lire un livre où "tous les hommes sont des c***" (oui, parfois, souvent, je ne suis pas une princesse au langage châtié), j'ai fait confiance à ses recommandations chaleureuses, et m'en voici plus que comblée.

 

Le roman se présente de manière originale : chaque chapitre correspond à un moment de la vie de ces Japonaises en exil, et est composé du récit de chacune. Par exemple, au chapitre "Naissances", chacune raconte les conditions de son accouchement : "Nous avons accouché sous un chêne, l'été, par quarante-cinq degrés. Nous avons accouché près d'un poêle à bois dans la pièce unique de notre cabane par la nuit la plus froide de l'année. Nous avons accouché sur des îles venteuses du Delta, six mois après notre arrivée, nos bébés étaient minuscules, translucides, et ils sont morts au bout de trois jours. Nous avons accouché neuf mois après avoir débarqué de bébés parfaits, à la tête couverte de cheveux noirs."

 

Toutes ces vies uniques, mises bout à bout, forment un témoignage poignant de la vie réelle, et non plus rêvée, de ces nouvelles migrantes qui s'établissent aux Etats-Unis et n'ont plus d'autre choix que d'y rester : "Nous voilà en Amérique, nous dirions-nous, il n'y a pas à s'inquiéter. Et nous aurions tort."

 

Loin d'être les époux auxquels elles rêvaient, les hommes qu'elles rejoignent leur ont menti : plus vieux, plus pauvres, méprisés, ils font partager aux femmes le calvaire qu'ils endurent à devoir travailler plus que de raison dans les champs de l'ouest américain : "Nos maris nous faisaient trimer comme des esclaves. Ils importent ces filles du Japon pour avoir de la main-d'oeuvre gratuite. Nous travaillions aux champs du matin au soir sans même nous arrêter pour manger. Nous travaillions aux champs tard dans la nuit à la lumière de nos lampes à pétrole. Jamais nous ne prenions un jour de congé. [...] Nous formions une machine économique imbattable, irrésistible, et si personne ne freinait notre élan, tout l'ouest des Etats-Unis serait bientôt un nouveau comptoir, une colonie asiatique."

 

Mais ces maris, bons ou mauvais, doux ou volages, ne sont guère attentifs aux souhaits brisés de ces femmes, et toutes se rejoignent dans une douleur perpétuelle et finissent par disparaître à elles-mêmes : "Nous leur préparions à manger. Nous nettoyions tout pour eux. Les aidions à couper du bois. Mais ce n'était pas nous qui cuisinions, lavions, maniions la hache, c'était une autre. Et la plupart du temps, nos maris ne s'apercevaient même pas que nous avions disparu."

 

Certaines choisiront la mort, d'autres vivront comme des automates. Mais toutes témoignent ici, grâce à Julie Otsuka, et j'en ai été particulièrement touchée. Magistral.

 

 

Julie Otsuka a obtenu, pour ce roman de la rentrée littéraire 2012, le prix Fémina étranger.

D'autres avis chez Theoma, Jérôme, Mélo.

 

* Librairie L'Autre Monde,

42, Grande Rue

89200 Avallon.

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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 21:54

Qui suis-je ? Où vais-je ? Dans quel état j'erre ?


J'ai l'habitude de commencer mes articles par un résumé de l'oeuvre lue. Ici, il m'est difficile de me plier à cet exercice !

 

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On navigue dans cet ouvrage entre "le fil du labyrinthe" et "le rêve du Vieux". Après le temps du récit vient ensuite le temps des interrogations : "Pourquoi y a-t-il quelque chose au lieu de rien ?", "La mort : un commencement ?". Jean d'Ormesson nous fait traverser les siècles pour exposer d'éventuelles bribes de réponses qui, une fois additionnées, devraient nous rassurer et nous expliquent en tout cas son sourire légendaire.

 

Les premiers hommes, puis les Anciens, ainsi que les Chinois et les Indo-Européens, tous sont observés à travers leurs dieux et les écrits qui nous sont parvenus. On rencontre à cette occasion Ulysse, l'homme aux mille tours, avant d'assister au banquet des philosophes grecs. Des siècles plus tard viendront Copernic, Niepce, Newton et d'autres, portant et favorisant le progrès parmi les hommes. Inutile évidemment de préciser que l'on apprend beaucoup, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire... ou le lire !

 

D'historien, Jean d'Ormesson se fait conteur pour narrer des anecdotes venues de loin, qui nous laisseraient presque penser qu'il a vécu plusieurs vies. Entrelacées avec des souvenirs plus personnels, ses réflexions reprennent, sur un mode cette fois plus clairement personnel. Loin d'adopter le ton d'un professeur de philosophie, l'auteur nous ouvre la voie pour goûter la vie et ses joies : là où des questions portant sur la vie et la mort pourraient effrayer, il nous en détourne en écrivant sur un ton jamais pessimiste mais au contraire gai et positif.

 

On referme cet ouvrage sûrement plus sage qu'on ne l'a ouvert, en sachant qu'on pourra y retrouver, au gré des interrogations et du temps qui passe, les réponses rassurantes d'un vieux monsieur docte qui s'émerveille toujours comme un enfant devant la beauté du monde et de la vie.

 

Merci à Livraddict pour ce partenariat avec les éditions Robert Laffont !

Bien des bloggeurs ont lu cet ouvrage, mais c'est avec ma copine Lili que je le lisais cette fois-ci, et je crois savoir qu'elle a été enthousiasmée !


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21 avril 2010 3 21 /04 /avril /2010 20:02

C'est un tel plaisir qu'un livre choisi dans le cadre d'un partenariat parce qu'il semblait tentant se révèle finalement encore meilleur que ce que l'on s'imaginait. C'est le cas aujourd'hui avec Speed Queen.

 

speed queen

 

"Bon, vas-y, dis-nous plutôt de quoi ça parle !"

 

Marjorie est en prison, plus pour longtemps : elle attend dans le couloir de la mort son exécution qui doit avoir lieu dans la soirée. Pour subvenir aux besoins à venir du fils qu'elle laisse orphelin, elle a accepté de répondre aux questions d'un romancier qui désire écrire un livre à partir de son histoire. Ce romancier n'est pas n'importe qui : il s'agit de Stephen King.

Marjorie se lance donc dans un récit de sa vie, rythmé par les questions diverses d'une liste qu'elle égrenne : ayant connu l'alcoolisme au début de sa vie d'adulte après une enfance pourtant heureuse, elle sombre dans la dépendance à des tas de drogues, dépendance que connaît aussi son compagnon, Lamont. Pour quelques petits délits, Marjorie est emprisonnée une première fois et rencontre Natalie, qui deviendra son amante puis celle de Lamont. Le triangle amoureux, bientôt déchiré par les rivalités, va dériver vers des délits de plus en plus graves, jusqu'à une série de meurtres en chaîne qui les mènent au point de non-retour...

 

Je vous dirai tout de suite que je n'ai pas trouvé trace de l'humour décapant qu'évoque la couverture. En revanche, "l'intelligence implacable", oui et re-oui. S'agissant déjà de la forme choisie par l'auteur, il y a de quoi s'étonner : jamais nous ne lirons la moindre question formulée par le Stephen King qui interroge Marjorie, mais directement les réponses de cette dernière ou une de ses reformulations. D'ailleurs, les références aux grandes oeuvres de King sont légion dans les réponses de Marjorie.

 

Marjorie raconte une histoire qui pourrait faire froid dans le dos : la manière dont se concluent les assassinats qu'ils commettent fait frémir, et Marjorie n'enjolive rien. Pourtant, à travers ses dires, elle apparaît comme une femme amoureuse, qui se veut forte mais n'est que pathétique : prête à tout pour l'homme qu'elle aime, elle ne se rend pas compte des folies qu'elle accepte, ni du fait qu'ils basculent de plus en plus profondément dans l'illégalité avec leurs petits trafics en tous genres. Malgré tout, on ne peut s'empêcher de la trouver attachante et de redouter la fin du livre, quand viendra le moment de l'injection léthale...

 

A travers les souvenirs de son personnage, Stewart O'Nan brosse un portrait plutôt effrayant de l'Amérique profonde : accros aux multiples mets proposés dans tous les fast-foods imaginables et complètement dingues de voitures, Marjorie énumère sans complexe des noms abracadabrantesques de plats ou d'équipements automobiles très détaillés, au point que le traducteur ait éprouvé le besoin d'ajouter en fin d'ouvrage un lexique pour expliquer ce que désignent tous ces mots. Grand bien lui en a pris ! Le tout forme un ouvrage édifiant, étonnant et addictif, comme la drogue l'était pour Marjorie. Du O'Nan, j'en redemande !

 

 

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Je remercie la Blog-O-Book Team et les éditions Points pour cet envoi !



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21 décembre 2009 1 21 /12 /décembre /2009 13:43
Si j'ai choisi d'ajouter ce livre à ma PAL, c'est tout simplement parce qu'il est au programme de mes terminales latinistes pour le bac : vous allez voir qu'il nous réserve de grands moments de réflexion/poilade, au choix !
The Bursar a lu en parallèle le Phèdre de Platon qui recèle, entre autres, et si mes souvenirs sont bons, un discours sur l'amour.

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"Bon, vas-y, dis-nous plutôt de quoi ça parle !"

L'Art d'aimer se compose de trois livres, dans lesquels Ovide donne des conseils, d'abord aux hommes puis aux femmes, pour trouver l'amour, plaire à l'autre et le garder. C'est donc un véritable manuel du savoir séduire que nous avons entre les mains !

Une fois n'est pas coutume, je peux vous dire tout de suite que j'ai aimé ma lecture, et vous allez vite comprendre pourquoi...

Comme dans son recueil Amours, Ovide compare celui qui aime à un soldat, qui a la vie rude et qui supporte de nombreuses contraintes (
Ovide est loin d'être avare en métaphores : soldat, pêcheur, chasseur, tout y passe). Grâce à l'Art d'aimer, nous allons comprendre pourquoi : sachez que celui qui veut séduire est prêt à tout !

Première étape : savoir où lancer ses filets. "apprends d'abord où l'on rencontre en abondance la jeune fille" : avouez que c'est charmant ! La jeune fille est donc un produit, à la rigueur un animal, qui aime à se promener dans des endroits bien spécifiques : les lieux publics, le forum, le théâtre... D'ailleurs, il faut privilégier le théâtre : "là tu trouveras de quoi aimer, de quoi lutiner, de quoi faire une conquête d'un jour, de quoi nouer une liaison durable"... Vous avez l'embarras du choix ! N'oubliez pas non plus le cirque, car les places ne sont pas confortables et "obligent la belle à se laisser toucher". Un repas convient bien aussi. Mais là, attention : à l'époque d'Ovide déjà, on pouvait avoir de mauvaises surprises ! "Pour juger de la beauté, la nuit et le vin sont mauvais [...] ; à ces heures-là, toute femme semble belle" : eh oui, attention au réveil douloureux le lendemain aux côtés d'une conquête peu glorieuse !

Après avoir trouvé l'objet de son amour, il faut maintenant trouver les moyens de lui plaire. Là encore, Ovide fourmille de bons conseils. Il faut commencer par s'attacher la complicité de la servante de la demoiselle, qui peut toujours être utile (la séduire elle aussi, c'est trop risqué...), et ne pas hésiter à écrire des lettres d'amour, à la fois simples et charmantes. Comme il nous le rappellera plus loin, de toute façon, faire des promesses ne coûte rien ! Et on n'est pas obligé de les tenir...
Ces messieurs devront penser à soigner leur apparence ; voici en vrac quelques conseils : "que leur toge aille bien et n'ait pas de taches", "qu'aucun poil ne se dresse dans les narines ; qu'une haleine désagréable ne sorte pas d'une bouche malodorante"... Quelque chose me dit que ces quelques précisions sont toujours d'actualité !
Et puis, messieurs, arrangez-vous pour que la belle n'apprenne pas vos infidélités : soyez discrets et malins ! Mais "si tes actes, quoique bien cachés, viennent à se découvrir, même découverts, nie-les jusqu'au bout !"... Charmant, encore et encore !

Rassurez-vous, mesdames, Ovide ne vous a pas oubliées : mieux, il vous réserve également quelques conseils de son cru. D'ailleurs, il commence avec sa version du carpe diem, avant d'enchaîner avec des remarques concernant le soin de votre personne. Si ces messieurs ont déjà fort à faire, vous n'êtes pas épargnées ; en parlant de beauté, Ovide vous fait ouvrir les yeux : "la plupart de vous n'ont pas reçu ce présent" ! Aïe... On commencera par soigner sa coiffure, avant de faire attention à sa tenue. J'ai gardé le meilleur pour la fin : "j'ai été sur le point de vous avertir qu'un bouc farouche ne devait pas loger sous vos aisselles et que vos jambes ne devaient pas être hérissées de poils rudes"... Mouahahahah ! Heureusement, Ovide précise après que c'est un conseil aussi élémentaire que se brosser les dents et se nettoyer le visage. Veillez, mesdames, à rester discrètes quand vous vous apprêtez : ces messieurs n'ont pas à connaître vos secrets de beauté. Je passe les conseils donnés aux messieurs auparavant, qu'Ovide arrange à la sauce féminine, pour en venir à l'attitude à garder au lit... L'auteur a réponse à tout ! "La femme dont la figure est particulièrement jolie s'étendra sur le dos" : il faut comprendre ensuite à demi-mot que les autres ne devront pas hésiter à tourner le dos ! Et ensuite, mesdames, n'hésitez pas... à simuler ! Et pour finir, "ne laisse pas la lumière pénétrer par toutes les fenêtres dans ta chambre à coucher ; bien des parties de votre corps gagnent à ne pas être vues au grand jour".

Comment ne pas apprécier cette lecture aussi pertinente qu'amusante ? Si Ovide ne fait pas forcément dans la délicatesse, au moins il va à l'essentiel. C'est un ouvrage qui se lit rapidement et s'apprécie tout aussi simplement. Vous aurez d'ailleurs remarqué qu'il ne se démode pas !
Je précise que je vous ai cité la traduction d'Henry Bornecque ; n'hésitez pas à me demander la correspondance dans le texte latin original si ça vous intéresse...

Et maintenant, tous et toutes chez The Bursar !

Ce livre me permet d'avancer dans le challenge organisé par Mariel !

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