Lorsque la jolie Félicie quitte la province pour gagner Paris, c'est la fortune qu'elle recherche. Pour atteindre son but, elle répugne pourtant à vendre son corps ou à user d'autres expédients du même genre : elle se sent bien supérieure à tout cela. Lorsqu'elle est embauchée en tant que bonne chez les Vaussanges, Félicie se satisfait pourtant fort bien des largesses de Monsieur et ne tardera pas à se laisser entraîner dans le lit conjugal des époux Vaussanges pour ramasser quelques billets supplémentaires... Par sa ruse, elle aidera également Mme Vaussanges et sa fille à commettre l'adultère pour l'une et à rencontrer son promis pour l'autre, défauts qui risquent de nuire à la bonne réputation de la famille s'ils venaient à être ébruités.
Si elle existait, Jean-Louis Dubut de Laforest, JLDDL pour les intimes, pourrait facilement être classé dans la catégorie des auteurs morts et oubliés depuis longtemps. Auteur prolifique du XIXème siècle, il aurait très bien pu ne jamais croiser ma route si les Agents littéraires, qui travaillent donc également avec des auteurs morts, ne m'avaient proposé de m'envoyer cet ouvrage.
Digne des grands romans feuilletons, La Bonne à tout faire a tout pour plaire. Une domestique rusée qui veut s'élever au-dessus de sa condition, des patrons petit-bourgeois au mauvais goût assumé et à la moralité chancelante, de jeunes personnes influençables : voilà une galerie de personnages hauts en couleurs. Dans un siècle propice à tous les vices, la médecine a de beaux jours devant elle et Dubut de Laforest nous présente aussi bien la douce Céleste, qui soigne ses chagrins d'amour aux vapeurs de l'éther, que le jeune Ambroise Le Roux, jeune médecin ambitieux mais timide, sur le point d'expérimenter son remède contre la syphilis.
Marqués par le sceau de la déchéance, les personnages ne sauront lutter contre une dépravation qui les gagne tous petit à petit, à l'exception d'un ou deux d'entre eux, de fieffés filous qui ne reculent devant rien pour se sortir de leur misère crasse. Cette misère est constamment mise par l'auteur en regard avec l'aisance bourgeoise, mais on constate bien vite que naître dans la deuxième catégorie est loin d'être le gage d'une vie heureuse et digne de vertu. Voilà un ouvrage que Zola n'aurait peut-être pas renié ou qui, du moins, sait se montrer digne de ses prédécesseurs !
Et si, comme moi, vous ignoriez jusqu'à peu l'existence de JLDDL (ce qui n'est en fait pas plus rapide à lire), sachez que l'ouvrage, édité aux éditions du Livre unique, propose une introduction particulièrement complète et bien faite sur l'auteur et son oeuvre, et surtout que l'ouvrage s'accompagne de la version théâtralisée de La Bonne à tout faire !
Merci aux Agents Littéraires pour cette belle découverte !