Ayant arpenté le Chemin dit "du Nord", qui l'a mené jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle, l'académicien Jean-Christophe Rufin nous raconte son pèlerinage, par instants religieux, par instants spirituel, mais surtout très personnel. Il nous en révèle les secrets, nous faisant pénétrer dans le quotidien (pas toujours reluisant !) des marcheurs.
Habitant à proximité d'un site connu entre autres comme point de départ du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, le très joli village de Vézelay, j'ai l'habitude de voir fleurir dans les librairies locales des ouvrages spécialisés sur le sujet. Il n'est pas rare d'ailleurs de croiser sur de petites routes des marcheurs courageux harnachés de leur paquetage, et même une promenade dans le bois juste à côté de chez moi permet de tomber, au détour d'un petit chemin, sur le marquage du chemin, avec des balises stylisées de ce genre :
Ce n'est pas pour autant que l'idée de parcourir un jour ne serait-ce qu'un kilomètre du chemin m'ait un jour effleurée, loin de là ! Mais il est amusant de constater, étant donné la distance impressionnante entre Vézelay et Saint-Jacques, que les marcheurs partis d'ici trouvent dans leur point de départ un sujet de vantardise qu'ils évoquent fièrement jusqu'à l'arrivée. Jean-Christophe Rufin nous explique donc que les marcheurs, plus que des mystiques, sont très souvent des gens arrivés là par hasard, à son image, après une réflexion personnelle plus ou moins poussée, avouée, et qui sont donc très humains : ils se vantent, se plaignent, sentent mauvais et obéissent aux instincts et besoins les plus animaux de leurs corps ! Eh oui, un voyage à pied pendant des jours et des jours a tendance à révéler les défauts de chacun : "Le pèlerin de Saint-Jacques, que l'on appelle un Jacquet, n'est pas toujours pauvre, loin s'en faut, mais il se comporte comme s'il l'était. On peut rattacher ce comportement à l'un des trois voeux qui, avec la chasteté et l'obéissance, marquent depuis le Moyen Âge l'entrée dans la vie religieuse ; on peut aussi appeler cela plus simplement de la radinerie."
Jean-Christophe Rufin n'a pas écrit ce livre pour dégoûter les futurs pèlerins, mais davantage pour partager son ressenti sur un chemin qui l'a surpris, charmé, découragé, métamorphosé. On suit ainsi ses pensées, ponctuées de traits d'humour qui rendent le livre accessibles à tous ; attention, il ne s'agit pas là d'un mode d'emploi, mais bien d'un récit de voyage ! J'en recommande chaudement la lecture, avant de prendre la route, mais aussi tranquillement installé(e) chez soi !