Clémence, une jeune fille hyper sensible et aux tendances anorexiques, est internée en hôpital psychiatrique « pour son bien », selon la formule consacrée. Alors qu’elle estime être en état de sortir, Clémence voit cette autorisation lui être refusée : enragée, elle se rebiffe ; elle sera droguée et enfermée dans une cellule d’isolement : plus jamais elle ne parlera.
Quelques années plus tard, Clémence, devenue une jeune femme, mais toujours muette, débute des études de médecine : elle fera en cette occasion la connaissance de Philippe, un jeune homme issu de la bourgeoisie bruxelloise, qu’elle intrigue beaucoup. Une manifestation qui dégénère les rapproche plus que prévu et Philippe tombe sous le charme étrange de Clémence, qui vit toujours à l’hôpital. S’amorce alors un long chemin entrepris par Philippe pour comprendre Clémence, sa vie et ses douleurs.
Damnée s’ouvre sur la description de l’institut dans lequel on découvrira ensuite Clémence, avenue du Bout du Monde, comme l’appellent les riverains : drôle de nom, pour une avenue de centre ville, mais qui n’est pas sans évoquer la distance mise entre Clémence et le reste du monde. Cette distance, d’abord subie par l’enfermement tangible de Clémence dans le centre hospitalier, se double ensuite d’un enfermement à un degré plus profond : Clémence, en refusant de parler alors qu’elle en est physiquement capable, se protège des horreurs et des erreurs du monde, mais de toute vraie relation avec ceux qu’elle laisse tant bien que mal l’approcher.
C’est bel et bien la relation naissante entre Clémence et Philippe qui fait l’intérêt essentiel de ce roman : Hélène, Catherine (mais pourquoi ce « Nathalie » sur la quatrième de couverture ?) et Diego ne sont que des personnages secondaires, presque des fantômes, tant la relation intime de Philippe et Clémence semble profonde. Les autres ne sont finalement que des hommes et des femmes ordinaires, dont la compréhension et l’empathie ne sont pas amenés à leur paroxysme. C’est d’autant plus amusant et paradoxal quand, à la fin du roman, l’auteur nous apprend ce que sont devenus les personnages, notamment Diego et Hélène ! Clémence a été, et restera, une héroïne presque tragique.
Damnée est un roman profondément humain et soutenu par un style foisonnant, multiple et poétique. L’écriture d’Isabelle Robert, qui signe là son premier roman, m’a portée souvent, émue parfois. Je n’ai qu’un petit, tout petit bémol à relever : les productions écrites par Clémence, poèmes et réflexions, distillées entre les chapitres, m’ont moins plu.
Je souhaite toutefois à Damnée et à son auteur une belle diffusion et une reconnaissance méritée, à la hauteur du travail d’écriture et de l’émotion ressentie à la lecture : voilà un livre que j'ai reçu grâce au site des Agents littéraires, qui font en sorte de faire mieux connaître "des livres peu médiatisés", comme le dit si bien leur devise... Vous pouvez retrouver mon article en cliquant ici, sur leur site !